
On aime ou on n'aime pas. Mais force est de constater que Pierre Soulages, « peintre du noir et de la lumière » est une figure majeure de la peinture non figurative, reconnue comme telle depuis ses débuts, au lendemain de la seconde guerre mondiale.
Le 24 décembre dernier, il a fêté son 100ème anniversaire. (Un contemporain de Boris Vian, donc.) C'est précisément à cette occasion que le musée du Louvre lui consacre une exposition exceptionnelle depuis le 11 décembre dans le prestigieux Salon Carré, situé entre la galerie d’Apollon et la Grande Galerie.
Cette exposition-hommage prend le parti de rendre compte du parcours chronologique de l’œuvre de 1946 à aujourd’hui, en représentant les huit décennies pendant lesquelles Soulages a développé ses recherches. Un choix resserré et assumé. La rare longévité de la carrière de l’artiste est ainsi illustrée par des œuvres majeures provenant principalement des plus grands musées français et étrangers. Ne négligeant aucune période et mettant l’accent sur les polyptyques outrenoir, l’exposition permet également de découvrir de très grandes peintures réalisées ces derniers mois, signe de sa vitalité remarquable.
Il est à noter que c’est la première fois que le musée du Louvre invite Pierre Soulages pour une exposition personnelle, même s'il a déjà exposé des œuvres au Louvre à deux reprises.
Dès ses débuts, ce Ruthénois d'origine a opté pour une abstraction totale, mettant en question les données traditionnelles de la peinture. Par les matériaux qu’il emploie (brou de noix, goudron...), par ses outils qui renvoient plutôt à ceux des peintres en bâtiment, par son choix d’identifier ses toiles par la technique, les dimensions et la date de réalisation, plutôt que d’orienter la vision par un titre, il adopte une position singulière. Il écrit dès 1948 : « Une peinture est un tout organisé, un ensemble de formes (lignes, surfaces colorées...) sur lequel viennent se faire et se défaire les sens qu’on lui prête ».
L’exposition témoigne de la continuité de l’œuvre, mais aussi de ses différents moments liés par la volonté de faire surgir la lumière par contraste entre la couleur noire et les parties claires, par superposition et raclage, ou encore par le mode d’application d’un pigment unique. C’est en 1979 que Soulages, peintre depuis plus de trente ans, aborde une nouvelle phase de son travail, une peinture autre pour laquelle il propose le néologisme d’outrenoir. L’aventure picturale de Soulages expérimente constamment le rapport entre le noir et la lumière, mais avec l’outrenoir qui instrumentalise le reflet, l’espace et le temps de la peinture sont radicalement transformés, la dotant d’une multiplicité lumineuse totalement inédite. Au contraire d’une œuvre monochrome, « ce sont des différences de textures, lisses, fibreuses, calmes, tendues ou agitées qui, captant ou refusant la lumière, font naître les noirs gris ou les noirs profonds ».

Soulages au Louvre
Aile Denon, Salon carré.
Ouvert tous les jours sauf le mardi, de 9h à 17h30 et jusqu'à 21h30 les mercredis, vendredis et le premier samedi de chaque mois.
Commissaire de l'exposition : Pierre Encrevé † et Alfred Pacquement.
Et au Centre Pompidou
Accrochage Soulages et le Musée national d'art moderne
jusqu'au 9 mars également, niveau 5
Site internet consacré à Pierre Soulages
Le public ne semble en tout cas pas indifférent à l'exposition. Et on le comprend.
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